En 2024, Jeux Olympiques obligent, le défilé du 14 Juillet s’est tenu pour la deuxième fois de son histoire sur l’avenue Foch. L’ouverture de celui-ci fut marquée par une émouvante animation dont le thème était les 80 ans des Débarquements et de la Libération de la France. Pour beaucoup la libération de notre pays est intimement liée au débarquement en Normandie le 6 juin 1944. Mais n’oublions pas qu’un peu plus de deux mois après, le 15 août, débutait le débarquement en Provence.
En évoquant ce jour du 6 juin 1944 tout le monde a en tête les images du film « Le jour le plus long » de Darryl F. Zannuck. C’est donc sur la célèbre musique de Maurice Jarre suivie d’un trépidant « Sing Sing Sing » de Glenn Miller interprété par l’orchestre de jazz de la musique de l’Air et de l’Espace que devait débuter cette commémoration du 80ème anniversaire des Débarquements.
Mais peut-être qu’indépendamment de la musique de ce film, vous revient en mémoire cet air de cornemuse entonné par le piper écossais Bill Millin. Alors qu’il n’a pas encore rejoint la terre ferme, le voici interprétant « Hielan ‘Laddie » pour galvaniser les soldats britanniques de la First Special Brigade débarquant sur la plage de Sword Beach à Colleville-Montgomery. Cette brigade est commandée par Lord Lovat, un autre écossais. C’est à sa demande qu’il entonna cet air alors que depuis la première guerre mondiale l’armée britannique avait interdit aux sonneurs de cornemuse de jouer de leur instrument durant les combats en raison des pertes considérables qu’ils connurent durant ce conflit. Un peu plus tard dans le film on le retrouve traversant sans défaillir un seul instant sous les balles allemandes le pont de Bénouville, plus connu sous le nom de Pegasus Bridge. Bill Millin venait d’entrer dans la légende pour devenir l’un des symboles de ce débarquement en Normandie.
Pour commémorer ce moment héroïque du débarquement, ce sont les caporaux-chefs Clément et Vincent de la fanfare-bagad de la 9ème BIMA (Brigade d’Infanterie de Marine) de Poitiers qui eurent l’honneur d’interpréter l’un des morceaux joués par Bill Millin à savoir « Blue Bonnets Over The Border », morceau joué lors de la traversée du pont. En français ce titre se traduit par « Les Bérets Bleus sont à la frontière », un titre de circonstance. Ces deux sonneurs de cornemuse étaient suivis dans leur marche par des soldats représentant les différentes troupes alliées venues libérer la France. Que ce soit pendant les répétitions ou lors du défilé, cette musique puissante, entrainante et pénétrante, ne put que déclencher une émotion certaine et un sentiment de vive reconnaissance parmi toutes les personnes présentes.
Quelque part ce sont toutes ces images du film de Darryl F. Zannuck qui défilent dans les têtes avec tous ces jeunes soldats venus au péril de leur vie libérer un pays que, pour la plupart, ils ne connaissaient pas. Probablement qu’en ce jour du 6 juin 1944 la réalité fut bien plus meurtrière que ne le laisse voir ce film. Mais au milieu de ces actes héroïques Bill Millin continua à jouer de sa cornemuse et ne dut sa vie sauve qu’à la sidération qu’il provoqua chez les soldats ennemis désemparés face à ce « fou » bravant la mitraille en musique.
Mais pourquoi la cornemuse a-t-elle trouvé sa place au sein de troupes militaires et notamment au sein des régiments écossais ? Non seulement utilisée pour la musique et pour marquer le rythme des marches, elle pouvait servir à donner des ordres sur les champs de bataille en raison de son niveau sonore capable de couvrir le bruit des combats. Il faut savoir que cet instrument si particulier peut atteindre en plein air des niveaux supérieurs à 100 décibels. Non content de donner du courage aux troupes, il avait aussi pour objectif d’impressionner les soldats ennemis, voire effrayer ceux qui pour la première fois l’entendaient.
Dans sa marche héroïque, Bill Millin alors âgé de 21 ans est entré dans la légende en ce jour le plus long de juin 1944. C’est lors du 69ème anniversaire du débarquement en Normandie en 2013 qu’une statue à son effigie fut inaugurée à Colleville-Montgomery. Décédé en août 2010 le plus célèbre des pipers ne put assister à cette inauguration alors qu’il avait approuvé ce projet lorsqu’il lui fut présenté en 2009.
« Blue Bonnets Over the Border », un air qui depuis ce D-Day a franchi bien des frontières.
Pour ceux qui veulent revivre le défilé du 14 juillet 2024 et revoir ces images de Bill Millin dans « Le jour le plus long » il suffit de cliquer sur ces liens.